TRANSFORMATION DIGITALE - Pilier du développement de Madagascar

Tahina Razafindramalo, ministre du Développement numérique, de la transformation digitale, des postes et des télécommunications

Incontournable

La transformation digitale et le développement du numérique sont devenus au fil des années un passage obligatoire pour le développement économique d’un pays, quelle que soit la partie du monde où il se situe. Force est de constater que depuis une décennie, les pays africains, Madagascar inclus, hâtent le pas pour rattraper leur retard par rapport à ce que les experts qualifient de Quatrième Révolution Industrielle à savoir l’explosion du numérique. Beaucoup s’interrogent sur les enjeux de procéder à la digitalisation et plus encore sur la nécessité de s’empresser à instaurer la gouvernance digitale. « Un levier sans précédent pour les économies nationale et mondiale », voilà comment les spécialistes et les intervenants dans les journaux économiques qualifient la transformation digitale. Celle-ci constitue en effet une opportunité et s’en priver pourrait être fatale pour le continent africain et surtout pour les pays en développement comme Madagascar. 

En se penchant sur le cas des pays africains, certains ont entamé le développement de leur écosystème numérique avant les autres, engendrant une forte disparité dans l'utilisation de l’outil digital sur le continent. En effet, pour le continent, se priver de la digitalisation et des services numériques c’est risquer de laisser passer une opportunité et un capital de 300 milliards de dollars ainsi qu’une contribution à hauteur de 4,6% du PIB du continent.  Néanmoins, un travail considérable attend les pays africains pour atteindre un niveau de transformation numérique et de E-Gouvernance digne de ce nom. Ce sont les pays du Maghreb, en l’occurrence l’Égypte et le Maroc, plus quelques pays de l’Afrique subsaharienne dont  l’Afrique du Sud, le Rwanda et le Kenya qui disposent d’une très large avancée dans l’utilisation du numérique.

La transformation digitale atteint toutes les couches de la  société jusqu'à la base, avec des projets comme le e-fokontany 

Stratégie

Pour Madagascar qui a hébergé la XII ème édition des Assises de la transformation digitale en Afrique (ATDA) au mois de mai, l’enjeu est de taille. Les experts du continent ainsi que les opérateurs économiques ont  tous été unanimes sur le cas de la Grande île qui a « Des cartes à jouer pour les entreprises et pour l’économie à travers la transformation digitale à Madagascar ». Le terrain vient à peine d’être défriché par l’État, cependant, le processus avance à grands pas pour faire de la Grande île un Hub pour l’ocean Indien en premier lieu et en Afrique en deuxième lieu comme indiqué dans la politique générale de l’État. Le ministère du Développement numérique, de la transformation digitale, des postes et des télécommunications (MNDPT), à travers la mise en place du  Plan sectoriel sur le numérique (PSN),  met en exergue l’effectivité de la transformation digitale à Madagascar. La priorité du gouvernement est de « faire en sorte que chaque citoyen possède une identité unique numérique pour que chaque citoyen puisse jouir de ses droits grâce à cette identification », comme l’avait indiqué les responsables du MNDPT en marge des journées d’ATDA. Pour la Grande île, la stratégie nationale est déclinée en quatre grands axes. Le premier axe consiste en la refonte du cadre juridique régissant le secteur du numérique. 

Le second axe porte sur le développement du secteur des télécommunications. Un exemple est donné par le grand projet MRTAM, Modernisation des réseaux de télécommunications de l’Administration malagasy, qui vise à mettre en place une modernisation de la communication des services publics, posant la question de  la sécurité de Madagascar au cœur du système numérique. Par ailleurs, Le MNDPT a également confié vouloir procéder à la transformation digitale a tous les niveaux des services publics, en commençant notamment par le secteur de  la santé ou encore l’éducation. Le troisième axe porte sur le développement du capital humain et enfin l’on parle en quatrième axe de l’innovation et de l’inclusion financière.

Dématérialisation des moyens de payement de l'Etat pour Mesupres

Des économies

Des statistiques illustrent la bonne marche de l’avancement du processus de digitalisation à Madagascar. Selon l'unité de gouvernance digitale, sur la période allant de 2021 à 2023, l’État a pu économiser 18 milliards d’ariary en commençant à digitaliser le paiement des bourses des étudiants des universités. Si le paiement des émoluments est estimé actuellement à 40 milliards d’ariary, la digitalisation de ce système pourrait faire épargner plus de la moitié de cette somme à l’État si on se fie aux calculs fournis par le MNDPT. Ceci serait possible grâce à la mise en œuvre du processus de digitalisation auprès des services publics, nettoyant ainsi un bon nombre de chaises vides et de fonctionnaires fantômes, libérant l’engrenage de la machine administrative et des paiements. Les grands gagnants de la digitalisation à Madagascar sont aussi les entreprises. Des plateformes comme Orinasa.com, mise en place par l’EDBM (Economic Development Board of Madagascar) permettent par exemple de créer des entreprises en ligne. En l’espace d’une quinzaine d’années, Madagascar est devenu une destination de choix pour les entreprises décidant de s’exporter à l’étranger. La tendance est exponentielle pour le secteur grâce à l’accès aux services digitaux après la crise sanitaire de 2019.

la sécurité publique est également au cœur de la modernisation des  réseaux de télécommunication  du projet MRTAM

Toutefois, les défis sont encore de taille pour promouvoir le secteur de manière efficace comme  l’importance de booster le capital humain ainsi que le nombre de connectés à internet. Le taux de pénétration d’internet peine à dépasser les 33%  établis comme la moyenne régionale, même si l’utilisation d’internet a augmenté, atteignant les 22,3%  actuellement  contre 5,1% en 2016. Pour augmenter encore plus l'inclusion numérique à Madagascar, ainsi que l'accès à internet, un des baromètres pour mesurer l'utilisation du numérique pour un pays, les responsables ont misé sur une libéralisation de l'accès à internet à partir de la fibre optique. Ce processus a été engagé  cette année 2023, avec l’objectif, à terme, d'augmenter significativement le nombre de gens connectés à travers la Grande île et de surcroît, faire passer un autre cap à la Transformation Digitale déjà en marche actuellement. Des challenges restent toutefois à surmonter pour permettre l'effectivité de cette manœuvre, des défis d'ordre financier, technique mais aussi et surtout humain.

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