Cet indécent. C’est ainsi que l’on peut qualifier l’exploitation de deux handicapés, deux avortons dans les animations artistiques d’une campagne électorale. On les a offert en spectacle au cours d’une prestation scénique. On peut se permettre toutes les folies et toutes les fantaisies dans une campagne électorale, mais cette idée est totalement déplacée et manque de noblesse.
Pas plus hauts que trois pommes, les deux êtres mal lotis par la nature ont fait rire et rigoler le public. On ignore s’ils ont bénéficié d’un cachet royal comme les stars de campagne pour améliorer un peu leur quotidien qu’on imagine difficile avec le rejet et la marginalisation de la société. Le fait est que le public leur donne des billets durant le spectacle comme au hiragasy. D’aucuns vont dire qu’ils ont de la chance divine de se retrouver dans cette campagne alors que d’autres personnes, saquées par le sort comme eux, ruminent leur destin en silence. Justement la campagne électorale est une occasion d’annoncer un programme sérieux de prise en charge de toutes ces personnes incapables de s’assumer et devenues de lourdes charges pour leurs familles. C’est d’autant plus nécessaire qu’elles sont de plus en plus nombreuses à arpenter les rues. On aurait pu commencer par ces deux pauvres garçons en prenant en main leur existence au lieu de les considérer comme des bêtes de foire.
C’est peut-être trop demander dans une conjoncture où les valides manquent d’eau et d’électricité, vivent dans une insécurité chronique. Mais quand on voit le déploiement de moyens des candidats dans cette campagne, on se dit que cela est parfaitement réalisable. D’ailleurs, on a signé toutes les conventions internationales sur les droits des handicapés, mais elles restent lettre morte. Il n’y aucune obligation imposée par les pouvoirs publics en faveur des handicapés. Les hôpitaux publics, les établissements hôteliers, les bureaux administratifs, les transports en commun ne sont guère équipés pour le confort des handicapés. Pire, les places réservées aux personnes handicapées ont disparu avec les gros bus de jadis. Les taxibe refusent d’embarquer les handicapés soi-disant qu’ils perdent du temps à la montée comme à la descente.
On n’oublie pas les salles de spectacles ou les stades où les handicapés sont les grands oubliés.
Bref, beaucoup de chemin reste à faire pour que les droits des handicapés quittent le domaine de la chimère. Pire, à en juger les faits, ils servent à amuser la galerie et de saltimbanques comme au temps des rois. Nous trompons nous d’époque?
Sylvain Ranjalahy