Hayao Miyazaki occupe actuellement le sommet des affiches des salles de cinéma qui projettent sa dernière œuvre, Le Garçon et le héron, un film qui vient ainsi compléter une liste d’animés qui sont tous des rayons du soleil majestueux que le maître de l’animation japonaise a offerts à des générations
d’amoureux d’évasions magiques, qui ont assouvi la quête de divertissement de beaucoup. Et au milieu de ces envolées lyriques, s’affirme l’ambition philosophique affirmée de Miyazaki, une aspiration freinée, selon le maître lui-même, par sa proximité inébranlable avec le rire.
Dans sa filmographie se déploie un message sur la nature humaine et notre relation avec le monde qui nous entoure. Dans ces films, qui transportent dans des mondes enchantés et fantastiques, la nature est un protagoniste incontournable, et l’espèce humaine expérimente différents modes de contact avec l’environnement. Et c’est ainsi que les œuvres du studio Ghibli, loin d’être de simples sources de délectation pour les jeunes de 7 à 77 ans, sont les manifestations d’une pensée en mouvement. Et l’écosystème s’exprime à travers la succession narrative des images.
C’est ainsi que des problématiques d’ordre environnemental sont traitées par Princesse Mononoké (1997), qui met en scène la relation compliquée entre les hommes et les éléments de la forêt et où se met en évidence cette utilité des considérations écologistes. Miyazaki nous invite alors à conserver notre esprit enfantin, capable de s’émerveiller devant la beauté de la nature dans Mon voisin Totoro (1988), avec les deux héroïnes qui incarnent l’enfance. Le Château dans le ciel (1986), où un collier porte à la fois un potentiel de destruction et une capacité nourricière. L’objet est un phàrmakon, un terme qui apparaît surtout dans Phèdre (Platon), étant à la fois un poison et un remède selon l’usage qu’on en fait. De cette histoire peut émaner une leçon sur les dilemmes moraux que peut susciter la technologie. Tant de questions auxquelles Hans Jonas répondrait par le «principe responsabilité» : que nos actions garantissent la survie des générations futures.
D’autres interrogations existentielles surgissent d’autres films. Le Voyage de Chihiro (2001) est celui d’une construction de soi : le personnage éponyme, en traversant différentes épreuves qui la font grandir, et ainsi, dans la lignée des pensées de Kierkegaard et Sartre, trouver sa propre voie et se définir.
Et la profondeur des films de Miyazaki, toujours servis par un visuel magnifique, est encore au rendez-vous avec Le Garçon et le héron, projeté, en ce moment, dans les salles obscures. Un film qui mérite, comme ses prédécesseurs, le détour.
Fenitra Ratefiarivony