EXPORTATION - Les producteurs peinent à accéder au marché du sisal

Le sisal malgache, fibre prisée à l’international, pourrait générer d’importants revenus pour le pays. Mais le manque de terres, d’investissements et la domination étrangère freinent la filière.

Malgré la qualité reconnue de sa fibre, Madagascar peine à exploiter pleinement le potentiel de son sisal.

«Le sisal malgache devrait être rentable, mais les producteurs locaux manquent de moyens », explique un exploitant du sud de Madagascar qui a récemment dû céder son terrain de 60 hectares. Avec une production annuelle de 17 578 tonnes, Madagascar se classe au quatrième rang mondial, derrière le Brésil, la Tanzanie et le Kenya. La fibre malgache est reconnue pour sa qualité exceptionnelle et constitue une source importante de devises dans un pays où la monnaie se déprécie rapidement.

Historiquement, « ce sont les étrangers qui ont développé l’exploitation du sisal dans le sud depuis les années 1940 et 1950 », souligne ce producteur. Aujourd’hui encore, bien que quatre sociétés exploitent la fibre dans la région, elles sont étrangères, et le marché reste largement structuré et contrôlé par ses acteurs non locaux.

La réalité du terrain complique l’expansion de la filière. « Un terrain de 60 hectares est minime par rapport aux grands exportateurs du sud, qui possèdent 20 000 hectares », précise un responsable local. Les exploitants doivent étendre les surfaces cultivées, mobiliser des centaines de travailleurs et assurer un suivi rigoureux de la production. Selon lui, « l’État ne peut pas vraiment intervenir, car il s’agit d’activités privées. Le partenariat avec des investisseurs reste donc indispensable ».

Difficiles d’accès

Le marché mondial du sisal est estimé à 1,2 milliard de dollars en 2023, avec une croissance prévue de 5 % par an jusqu’en 2030. Les principaux clients des producteurs malgaches sont la Chine (45 % des exportations), le Maroc (29 %) et l’Espagne (10 %). « La demande est énorme, surtout pour la Chine, mais l’accès aux zones de production reste compliqué », note-t-il.

L’éloignement des zones de production, la nécessité de mobiliser de nombreux travailleurs et le manque de terrains cultivables freinent l’expansion de la production.

Les fibres de sisal sont utilisées pour fabriquer du plâtre, de la peinture ou encore des matériaux industriels. « Il faudrait ajouter 100 à 200 hectares et mobiliser davantage de personnel pour répondre à la demande internationale », ajoute-t-il. Actuellement, très peu de sociétés malgaches peuvent prétendre exploiter le marché à grande échelle.

Ainsi, malgré sa position stratégique et la qualité reconnue de sa fibre, Madagascar peine encore à transformer son potentiel en succès commercial à l’international. Comme le résume l’exploitant : « Le marché existe, mais il reste difficile pour les opérateurs locaux d’y accéder pleinement. »

Irina Tsimijaly

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