Aus térité

Changement total, dites-vous ? On en a eu un petit aperçu hier à la Haute Cour constitutionnelle, à travers les habits du couple présidentiel. Simple, sobre, sans bijoux de grande valeur, même pas une montre de contrefaçon. C’est aux antipodes du défilé de mode, des habits soyeux des époques royales, des artifices des grands créateurs auxquels on était habitué depuis six ans dans une pareille cérémonie. Pourvu que cela dure. L’appétit vient en mangeant, et le pouvoir a ceci de commun avec l’alchimie : il peut transformer le vangovango en gourmette de 25 carats sertie de diamants bleus irisés. C’est pour cela que, quand on y est, on a du mal à accepter un départ inévitable quand la situation vous pousse à la porte.

Mais c’est trop peu pour juger. Le nouveau Chef de l’État était habillé en civil, mais rien ne l’empêchait de garder son pelage naturel pour faire vrai, comme le président du Burkina Faso, Ibrahim Traoré, ou le président ukrainien Zelensky, qui a mis pour la première fois un costume hier lors d’un entretien avec Donald Trump.

L’austérité n’est pas seulement un mot, une intention, un ordre. Cela doit commencer par le président, à l’image du colonel Richard Ratsimandrava, qui a choisi de garder sa banale Peugeot 404 malgré toutes les menaces et risques. Il serait encore président aujourd’hui s’il avait choisi une Cadillac ou une Lexus blindée. C’est d’autant plus vrai qu’il aurait eu 91 ans, c’est-à-dire moins vieux que le Camerounais Paul Biya, qui en est à son huitième mandat. Et rarement Ratsimandrava a-t-il quitté son treillis et son képi.

Le changement ne doit pas être superficiel. Le cortège présidentiel devrait refléter les difficultés du pays. Un cortège de V8 et de voitures blindées est un pied de nez à la population qui patauge dans la pauvreté. L’écart social est flagrant, même dans la rue, entre les gouvernants et les gouvernés. Et ce fossé constitue le ferment pour les pillages.

Par extension, il faudra également revoir les dépenses allouées aux ministères pour les parcs roulants. Là aussi, on assiste à un véritable salon de l’auto, où il ne manque que les Lamborghini, Bentley et Rolls-Royce, alors qu’aucun district ne dispose d’un service de sapeurs-pompiers. Même la mairie de la capitale vit de charité et d’assistanat.

Ailleurs, l’ancien président des Seychelles, James Michel, dont le PIB par habitant est de 18 000 dollars, ne dépense pas une vaillante roupie pour se payer une veste au marché de Mahé. Quelle que soit la cérémonie, il est toujours en chemise.

Et les choses risquent de ne pas trop changer, étant donné que tout le monde était presque présent hier à Ambohidahy : les vainqueurs et les vaincus. Il ne manquait que le président sortant et l’ancien président du Sénat. Et à la fin de la cérémonie, on a assisté à une procession de belles caisses : celles des sénateurs, des députés, des présidents d’institutions…

Pour normaliser l’approvisionnement en électricité et en eau, ce n’est pas sorcier : il faut prioriser les dépenses et mettre une croix sur les futilités et les caprices.

Sylvain Ranjalahy 

2 Commentaires

  1. Tiens une autre........illumination à🤡 l’Express ?
    Quel courage🫣 !

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  2. Une ligne éditoriale qui ne rebute pas l'inspiration

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