Normalement, le nom dérivé du verbe pester est pesteur. Mais les subtilités de la langue de Molière, et pourquoi pas celle de d’Ormesson, font que pesteur a tout un autre sens, en l’occurrence celui qui pétrit la pâte dans la boulangerie. Mais le moins que l’on puisse dire est que ces derniers temps, on est simplement passé du temps des pasteurs à l’époque des pesteurs, dans le sens de frondeurs.
À preuve, l’église FJKM a élu à sa tête le pasteur Zaka Hary Masy Andriamampianina en lieu et place de Irako Ammi Andriamahazosoa. Le dauphin a pris le relais et cela promet. Son sermon prononcé à Antsonjombe le 15 janvier 2023 lors du culte annuel de la FJKM a été juste un discours politique accablant le pouvoir en place et accusant ce dernier de tous les maux de la société. Des propos ont choqué certaines autorités présentes et d’obédience protestante. Il va sans dire qu’entre le pouvoir et les protestants, dont l’ancien président Marc Ravalomanana est un baron, cela n’a jamais été le grand amour. Le traitement infligé au pasteur Lala Rasendrahasina, alors président de la FJKM lors des événements de 2009 à Antanimena, est resté en travers de la gorge des protestants. Le pasteur Irako Ammi Andriamahazosoa en rajoutait une couche lors du discours de Noël 2024 en faisant référence à Hérode. Les relations se sont plus ou moins apaisées lorsque les caïds du FFKM ont été reçus au palais d’Iavoloha en janvier.
Le pasteur Zaka Hary Masy Andriamampianina a-t-il mis de l’eau dans son vin, au sens propre depuis ? Ce qui est sûr, c’est que si les protestants l’ont élu, ce n’est pas pour enterrer la hache de guerre avec le soutien de sept millions de fidèles qui sont autant d’électeurs.
Mais deux autres pasteurs se sont également fait entendre il y a quelques jours lors du rendez-vous annuel, 84ᵉ édition du « Fiofanana à Ankaramalaza », là où les candidats aux élections ont l’habitude de demander la bénédiction des Tangalamena. Les deux pasteurs ont dénoncé la mendicité qu’on essaie d’entretenir, ainsi que la corruption et les détournements dont les auteurs sont parmi les chrétiens.
Heureusement que les autorités ont rassuré que le chikungunya est pour le moment frappé d’interdiction de séjour. Sinon, on aurait demandé quelle mouche a piqué nos vaillants pasteurs. Une introspection en réalité face aux multiplications de nouvelles confessions alors que la morale sociale dépérit. Entre le nombre de fidèles et celui des malfrats, il y a deux lignes parallèles qui font un « run ».
Sylvain Ranjalahy