INDUSTRIE DU CIMENT - L’accès aux combustibles limite la production locale

Produire un ciment 100 % local reste un défi à Madagascar malgré des ressources abondantes. Alpha Ciment en illustre les limites, notamment la dépendance aux combustibles importés.

L’usine d’Alpha ciment à Ibity.

Fabriquer un ciment entièrement local reste un objectif difficile à atteindre pour le secteur cimentier à Madagascar. En dépit de ressources naturelles abondantes, des dépendances stratégiques — notamment en combustibles — freinent l’autonomie de production.

Le 18 juin 2025, lors d’une visite guidée de l’usine Alpha Ciment à Ibity, le directeur général Vincent Blanchet a partagé cette réalité avec des journalistes. Malgré l’utilisation de matériaux locaux tels que le cipolin, la pouzzolane et l’argile, des composants essentiels restent introuvables sur le territoire.

Le cipolin, extrait directement à Ibity, présente une réserve suffisante pour 400 ans d’exploitation. La pouzzolane, fournie depuis Tritriva, compose 37 % du ciment, tandis que 1 500 tonnes d’argile par semaine sont acheminées depuis Andranomanelatra. Mais cette base locale ne suffit pas.

« Le charbon représente environ 40 % de la composition du ciment, mais il n’est pas disponible localement », précise Andry Nirina Andriamanantena, directeur de l’usine. Alpha Ciment dépend d’importations de petcoke et de charbon en provenance des États-Unis ou de l’Afrique du Sud. Une tentative d’utilisation de charbon local s’est soldée par des accidents industriels. « Nous avons dû remplacer ce charbon par un produit importé de meilleure qualité pour garantir la sécurité et la continuité de la production », ajoute Vincent Blanchet.

Cette dépendance énergétique pèse sur le coût de fabrication. L’éloignement de l’usine par rapport aux ports, combiné au prix élevé du carburant, aggrave les frais logistiques.

Marché du ciment

Actuellement, Alpha Ciment produit environ 550 000 tonnes par an, soit près de 46 % d’un marché national estimé à 1,2 million de tonnes. La demande culmine durant la saison sèche, en mai et juin, avant de fléchir en décembre avec les pluies.

Pour faire face à une demande croissante, la société envisage d’augmenter sa capacité de production. « Le projet est en cours d’étude, mais il est trop tôt pour donner des détails. Il faut du temps, des financements et des autorisations pour sécuriser un tel investissement », précise le directeur général.

Selon lui, produire un ciment totalement local est certes une ambition louable, mais « dans le contexte actuel, c’est économiquement et techniquement incertain. » Il appelle à réfléchir à des solutions alternatives et à la création d’une filière énergétique nationale.

En 2025, Alpha Ciment célèbre ses 75 ans de présence à Madagascar, et les 40 ans de son site d’Ibity. L’entreprise, qui couvre près de la moitié du marché national, affirme son engagement pour une production de qualité, le respect des normes environnementales et de sécurité, ainsi que le soutien au développement local.

Irina Tsimijaly

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