Le Tananarivien lambda ne (s’en) sort des embouteillages que pour échouer dans un chez soi plongé dans le noir du délestage. Une fois branché tout le système alternatif, qui va du petit powerbank portatif à la quasi centrale nucléaire, à quoi diable peut-on s’occuper à la lueur de loupiotes aussi puissantes soient-elles.
Un couple des années 1930-1940 enfantait banalement douze gosses dont, tout aussi presque banalement, trois ou quatre mourraient en bas âge sinon dès la naissance. En protestation de modernité, les mariages des années 1990-2000 ne «produisirent» plus que le minimum, passant même en démographie négative. Ceux-là n’avaient pas la télé, ceux-ci par contre ont trop d’écrans. Enfin, c’est ce que les générations se médisent les unes des autres.
Au moins, ceux-là n’avaient pas à subir cette nervosité permanente que devient le quotidien tananarivien. Sortir de chez soi pour s’insérer, plus ou moins avec le sourire, dans de longues files d’embouteillages dont on sait déjà qu’ils dureront toute la journée. Le savoir, et s’y résigner. Si la pétarade et le carrousel des scooters le permettent, méditer (déjà amèrement) sur cette longue file de voitures immobilisées, dont un demi-kilomètre d’une petite centaine de taxibe.
Taxibe en mode «stop and go» intempestifs, sans préavis de clignotant ni respect des arrêts dédiés. Flux incessant de scooters qui dépassent à droite et coupent à gauche au nez et à la calandre de l’automobiliste matinal. Piétons hors les «passages cloutés», tête en l’air comme si certains avaient encore toute une vie d’erreurs et de correctifs devant eux. Tôt éméché de la journée à venir, sans avoir pu cuver les montées d’adrénaline, infimes mais multiples, d’hier.
Nasolo-Valiavo Andriamihaja