On la croyait à jamais révolue. Que nenni. La queue pour payer la facture dans les agences de la Jirama est bel et bien de retour depuis ce mois. Voilà un retour en arrière qui s’ajoute aux supplices des abonnés, déjà privés d’eau et d’électricité, mais obligés de payer la facture d’un service défaillant.
La Jirama a trouvé une solution pour éradiquer la queue et alléger la souffrance de ses abonnés en étalant l’envoi des factures par lot. Autrement dit, le paiement de la facture est étalé dans le mois pendant dix jours suivant la date d’arrivée du document. Les clients sont donc bien répartis et passent au maximum cinq minutes à la caisse. Ce qui n’est plus le cas désormais. Toutes les factures sont envoyées le 10 du mois et les abonnés ont dix jours pour s’acquitter de leur passif. Comme la Jirama compte huit cent mille clients, on imagine le rush dans les agences pour éviter d’être frappé par la pénalité de 5 % pour tout retard de paiement.
Un désagrément dont on se serait bien passé, mais la situation de la Jirama veut qu’on doive payer un service de piètre qualité en attendant que la situation s’améliore. Autrement dit, pas avant longtemps. Le président de la République lui-même a reconnu hier, lors de l’ouverture de l’Assemblée générale d’Africa 50, la plateforme financière pour les investissements stratégiques réunissant trente-deux pays, que « la situation énergétique à Madagascar est insoutenable ». Raison pour laquelle il a sollicité l’appui des investisseurs pour concrétiser les grands projets en matière d’énergie classique et renouvelable, à l’image du barrage hydroélectrique de Volobe. Faute de vision des régimes successifs en matière d’énergie, on se retrouve dans de beaux draps aujourd’hui.
L’État a octroyé cette année 1 200 milliards ariary à la Jirama en sacrifiant le budget des ministères, mais aucune amélioration n’a été constatée. Si chaque année, on consacre une telle somme à la réalisation des projets, on en serait à plusieurs Volobe actuellement.
En attendant, les pauvres abonnés de la Jirama doivent composer avec une situation compliquée et boivent carrément la tasse. Le recrutement d’un directeur général venu d’Israël n’a pas apporté le miracle espéré pour le moment. Ou plutôt si, avec la résurrection de la queue dans les agences. Un progrès à reculons qui n’augure rien de bon. Bannir la queue était un mince avantage, un bonus que tout le monde a apprécié malgré toutes les difficultés. Une petite faveur dorénavant disparue, pire, remplacée par un malus en cas de retard. C’est juste déprimant.
Sylvain Ranjalahy