À cinq heures du matin, dans un geste machinal d’homme moderne, j’actionnai l’interrupteur et ne fis même plus attention à ce que la lumière fut. Trois heures plus tard, la lumière était sous le boisseau de la Jirama et je me rendis compte de l’existence de l’électricité justement parce qu’elle était désormais absente.
Je peux comprendre la logique qui est en fait un choix : sacrifier la télévision du soir ou délester chauffe-eau et cafetière/bouilloire du matin. En espérant qu’à huit heures, presque tout le monde serait déjà, au pire dans les embouteillages, au mieux au bureau ou à l’école. Mais, nous sommes d’accord : rien que ce choix relève du Moyen-Âge.
Dans la même matinée, une patrouille sanitaire diligentée par le Ministère de la Santé prétendit me faire subir un vaccin contre la poliomyélite. Rappel (de connaissance, pas vaccinal) : la transmission du poliovirus se fait essentiellement par voie fécale-orale. C’est bien pour cette raison que, tous les ans et toute l’année, le Ministère de la Santé sensibilise à l’arrêt de la défécation à l’air libre.
Encore une fois, nous sommes absolument d’accord : autant de considérations, au mieux d’un roman de Zola, au pire de la pire crasse moyenâgeuse.
L’eau, celle de l’hygiène comme de l’alimentation, en vient déjà à manquer dans de nombreux quartiers de la Capitale. Et, faute d’avoir les moyens d’une douche d’eau minérale embouteillée, tout le monde se contente de l’eau que les camions-citernes de la Jirama livre quand elle peut, et quand l’eau est disponible.
Le lac de Mandroseza en viendra à se tarir ; Ikopa, Sisaony et Imamba en sont à leur étiage saisonnier ; la possible nappe phréatique est ensevelie sous les mètres cubes de remblais ; l’exode rural et régional augmente chaque jour la population d’Antananarivo et du Grand Tana… tous les éléments d’un script catastrophique sont réunis.
Je ne sais pas si vous êtes toujours d’accord : ça ne fait décidément pas 2024, entre Moyen-Âge et Apocalypse.
Nasolo-Valiavo Andriamihaja