Bernard Pivot (mai 1935-mai 2024)

Bernard Pivot, que même à 10.000 kilomètres, «les enfants de la télé» devaient connaître, est mort. Dans mon vieux «Quid 2001», la «Littérature française», rien que pour les auteurs nés après 1900, comporte onze pages, emplies des fameuses colonnes (a, b, c), rédigées en petits caractères. Bernard Pivot y figure en bonne compagnie alors que sa biographie indique qu’il était le premier «non-écrivain» admis à l’Académie Goncourt. 

Avant d’animer «Bouillon de culture» (1991-2001), Bernard Pivot avait créé une autre émission à succès, «Apostrophes» (1975-1990) : «échange d’idées, parfois vif», comme il la définissait. Et il avait pu y accorder tribune à des personnages douteux. Comme ce Gabriel Matzneff qui assumait son tourisme sexuel assorti de viols sur de jeunes garçons de Manille, aux Philippines.

Pour le grand public, on préfère définitivement le Bernard Pivot de la fameuse dictée, devenue «Dicos d’Or» en 1993, sur le modèle de la dictée de Prosper Mérimée, lue en 1857, «à la demande l’impératrice Eugénie pour distraire la Cour». À chaque mot, simplement méconnu, très savant ou vraiment exotique, la tentation du dictionnaire fut forte. Accords et conjugaisons démangeaient de consulter le «Bled». De fait, pour la «der des der», celle de 2005, les candidats revinrent sur les bancs du Collège de France. La Francophonie lui sera éternellement reconnaissante pour avoir conduit cette dictée en langue française jusque dans l’hémicycle de l’Assemblée Générale des Nations Unies : 206 candidats provenant de 108 pays. «Aucun piège de sens, rien que des pièges de grammaire et de vocabulaire», leur avait-il promis. C’était en avril 1992, avant le temps des SMS et autres langages onomatopéiques. 

L’éducation nationale française déplore une baisse continue du niveau des élèves en français. En 2022-2023, un élève de 6ème sur quatre n’avait pas le niveau requis. Selon une étude menée depuis 1987, le nombre moyen d’erreurs, pour la même dictée, est passée de 10,7 erreurs à 19,4 en 34 ans. Le «plan orthographe» prévoit régulièrement «une dictée quotidienne», mais les enseignants français se demandent où insérer dictée et «lecture de 1000 mots» dans une classe de 30 élèves. Ici, à Madagascar, J’ai bien grandi dans des classes de 48 à 52...

Je note que la mort de Bernard Pivot survient alors qu’est également annoncée la disparition prochaine de «Des chiffres et des Lettres», la plus ancienne émission des télévisions françaises, diffusée pour la première fois le 4 janvier 1972. C’est la fin d’une époque, le compte est bon. 

Nasolo-Valiavo Andriamihaja

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