Mahaleo for President

Dama (Rasolofondraosolo Zafimahaleo), né le 26 mai 1954, était un authentique «Gen Z» durant les évènements de mai 1972. Comme il s’en revendique en s’adressant aux «Gen Z» de 2025. Cette «Gen Z» là, de 1972, aura vécu cinq crises socio-politiques majeures (1972, 1991, 2002, 2009, 2018, 2025) et vu le pays s’enfoncer toujours plus dans le sous-développement. Ce ne fut pourtant pas faute d’avoir pointé les arlésiennes (Bemolanga), raillé l’incompétence (Ministra), dénoncé la démagogie (Ambohikobaka) et le fossé grandissant avec la population (Ambalambahoaka), appelé à la sauvegarde du «Fihavanana» : 

Mandady anie ny trambo

Avelao ny hambo

Atsaharo ny hazalambo

Henoy aloha ilay feo

Miantso hoe Vonjeo !

Je me souviens, à l’occasion de trois jours de concerts joués par les Mahaleo, à Antsahamanitra, avoir titré : «Mahaleo for President». C’était le 7 septembre 1998. Après une Chronique de 2009 («Appétit démocratique et famine populaire»), une autre de 2002 («Voeux à vue et à volonté»), nous voici donc en 1998. 

À cette époque, 1 Franc Français = 943 FMG, 1 dollar = 5453 FMG, 1 Deutsche Mark = 3161 FMG, 1 Franc Suisse = 3852 FMG, 1 Roupie Mauricienne = 227 FMG (soit 45 Ariary)... 

Le mois de septembre 1998 commençait par l’incroyable évasion de 117 prisonniers de Tsiafahy, un pénitencier de «haute sécurité». En mode Wanted, morts ou vifs, L’Express de Madagascar avait nommément cité chacun des fugitifs, tandis que 24 des mines les plus patibulaires étaient placardées pour aider à leur traque. En septembre 1998, le ticket de taxi-be passait de 500 FMG à 750 FMG ; Air Madagascar annonçait la destination Singapour «en Boeing 767-300, à partir du 29 octobre 1998» pendant que l’emblématique Boeing 747 5R-MFT assurait tranquillement sa rotation régulière entre Antananarivo et Paris. Tiens, l’île Maurice annonçait se pencher sur la valorisation de la bagasse, ce déchet de la canne à sucre, pour ses besoins en électricité... 

«Le groupe Mahaleo fête ses 25 ans (NDLR : en 2025, les Mahaleo, qui ne comptent plus que deux membres, en sont à leur 53ème année), avec un an de retard au calendrier mais il est d’anniversaires qui atteignent à l’intemporalité. Néanmoins, si Dama peut toujours plaisanter en entonnant «Tadidiko ry zalahy», lesquels de Bekoto, Charles, Dadah, Fafah, Nonoh, Raoul, applaudirons-nous encore dans 25 autres années ? La génération suivante sera-t-elle assez folle pour faire la queue quatre heures avant le concert, et chanter à tue-tête pendant 5 heures, sur trois jours d’affilée ?»

«Si un seul de nos gouvernants bénéficiait du dixième de la popularité des Mahaleo, l’autorité serait mieux établie, l’adhésion populaire aux entreprises de l’État plus entière. Mais, n’est-ce pas, on ne confie pas les affaires de l’État à des saltimbanques». 

«Et pourtant. Les unes des médias sont ouvertes à longueur d’année aux politiciens, mais quel ministre a jamais donné au public cinq heures de joie, d’insouciance, bref de simple bonheur ?»

«Les Mahaleo transcendent les générations et les couches sociales. Pour un concert de Mahaleo, l’information de base suffit : date, heure et lieu. Les fans de Mahaleo tiennent concert sans convocation et avec un ordre du jour indémodable : «Hiaraka isika». Car les Mahaleo chantent des thèmes que tout le monde peut s’approprier : des souvenirs d’enfance, le rêve qu’évoquent des mots simples, mais si lourds de contenu. L’amour, la nostalgie, la mélancolie, la joie, les pleurs, la vie».

«La vie justement, c’est-à-dire la mort, qui rattrape même les légendes. Les Mahaleo font un peu partie de la famille. On connaît leur répertoire sur le bout des doigts de ceux qui jouent de la guitare. Tout le monde récite les paroles par coeur, avec les mille détails que seule permet une longue intimité. Une communauté d’émotions dont nous porterons un jour le deuil, sobrement, sincèrement. Et pour épitaphe, un seul mot : Merci». 

Nasolo-Valiavo Andriamihaja

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