Surhommes

Surréaliste, irrationnel. Les mots manquaient certainement de puissance et de percussion pour qualifier les exploits des joueurs de tennis en finale de l’Open de France à Roland-Garros. Le vainqueur, l’Espagnol Carlos Alcaraz et son dauphin, l’Italien Jannik Sinner, sont restés cinq heures et demie d’horloge sur le court central Philippe Chatrier. Seul le duel entre Novak Djokovic et Rafael Nadal en finale de l’Open d’Australie en 2012 a duré plus longtemps (5h54) dans les annales. 

Le match est passé par plusieurs rebondissements. L’Italien menait 2 sets à 1 et menait par 5 jeux à 3 et 40 à 0 au quatrième set. Il servait pour le match mais s’est fait rattraper par l’Espagnol tenant du titre. Puis Carlos Alcaraz servait pour le match à 5 à 4 mais Jannik Sinner est revenu à 6-6 avant de craquer au super tie-break. Un match d’anthologie que même l’ancien champion américain André Agassi avait du mal à réaliser. Outre la course poursuite et les renversements de situations qui paraissaient irrémédiables, le caractère exceptionnel des coups rendus réciproquement par les deux joueurs plongeait le spectacle dans l’irréel et la fiction des jeux vidéo. Eh oui, on avait l’impression que les deux joueurs étaient télécommandés à la manette tellement certains coups relevaient d’effets spéciaux.

Mais au-delà de la beauté du spectacle, c’est la résistance hors normes de deux joueurs qui a de quoi sidérer. Pas une petite crampe au bout de 5h30 d’une bataille titanesque, aucune misérable ampoule. Pourtant Jannik Sinner a l’air frêle et ténu comme un brin de fétu. Le sport en général souffre toujours des problèmes de dopage dont certaines performances sèment le doute. Le tennis, hélas, n’en est pas épargné. Sinner lui-même sort à peine d’une suspension pour prise de substance dopante. Avant lui, la Polonaise Iga Swiatek, la Roumaine Simona Halep étaient également sanctionnées pour la même raison.

L’appât du gain, l’importance grandissante prise par l’argent dans le monde du sport et la course aux records exposent les athlètes à toutes les tentations. Le cyclisme est incontestablement la discipline la plus éclaboussée par des histoires de dopage à l’image d’anciens vainqueurs du Tour de France, à l’image de l’Américain Lance Armstrong titulaire de sept victoires, le Français Richard Virenque, l’Allemand Jan Ullrich, le Danois Bjarne Riis. Mais l’athlétisme est également marqué au fer rouge depuis le record du monde (9s83) annulé du Canadien Ben Johnson médaillé d’or rétrogradé aux J.O. 1988 de Séoul. D’autres athlètes à l’image de Marion Jones se sont fait attraper.

Aussi incroyable que cela puisse paraître, c’est le rugby qui compte le plus de joueurs dopés en 2024, suivi du cyclisme, de l’athlétisme et du football selon les statistiques de l’Agence internationale contre le dopage. Les performances sont de plus en plus incroyables. Certes, la médecine du sport, la diététique sportive, l’amélioration des équipements contribuent à l’établissement des records, mais on se demande s’il y a une limite à la devise olympique citius, altius, fortius (plus vite, plus haut, plus fort). Peut-on descendre en dessous du record du Jamaïcain Usain Bolt, 9s58 au 100m ? Le Suédois Armand Duplantis, recordman du monde du saut à la perche (6m27) pourrait monter au ciel de cette manière vu sa marge. Ainsi soit-il.

Et nos athlètes dans cette saga des dopages. Pour le moment, ni le cola enrobé de cacahuètes, ni le khat ne constituent un grand recours pour battre des records et gagner des matches. Les résultats du week-end le prouvent.

Sylvain Ranjalahy

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