Les commentaires furent extatiques après la finale entre Alcaraz et Sinner. À les entendre, ils auraient assisté à du jamais vu. Cependant, les plus anciens se souviennent, entre autres, de Wimbledon 2008, marquée par la victoire de Nadal sur Federer, quintuple tenant du titre. Où se situent les 4 heures 48 minutes de ce Wimbledon 2008 à l’échelle des 5 h 29 du Roland-Garros 2025 ? Si tant est qu’on puisse comparer deux époques différentes. Il faudrait tout revoir à l’aune des archives des premières confrontations Federer-Nadal, Federer-Djokovic, Nadal-Djokovic. Vingt ans plus tard, à l’heure du bilan d’une époque réellement bénie, les superlatifs sont légitimement de mise.
Le meilleur joueur du monde, à son meilleur niveau, peut infliger trois bicyclettes au millième mondial, mais ce serait un non-match absolu. Pour le spectacle, on peut se réjouir qu’Alcaraz et Sinner évoluent dans la même stratosphère. Alcaraz-Sinner, Sinner-Alcaraz : de belles prémices et des promesses à tenir. Tenir sur une double décennie, au-delà de cinq sets en finale de Grand Chelem.
Et s’inscrire en authentiques successeurs du «Big Three». Car il y eut même des intérimaires du grand spectacle à trois. Plutôt que Stan Wawrinka (né en 1985, 3 victoires et 1 finale perdue en Grand Chelem), c’est Andy Murray (né en 1987, 3 victoires et 8 finales perdues en Grand Chelem) qui fut associé à l’hommage rendu à Nadal, en raison de son rang d’ancien numéro Un mondial, même momentanément, presque entre parenthèses, à la fin 2016.
Le «Big 3» appartenait à une même génération : Federer né en 1981, Nadal 1986, Djokovic 1987. Leurs successeurs désignés, déjà conjugués au passé, étaient d’une autre même fourchette d’âge : Thiem 1993, Medvedev 1996, Zverev 1997. Aux demi-finales des Masters 2020, les jeunes ayant éliminé Nadal et Djokovic, on se crut arrivé à cette charnière des générations. Mais, les Thiem (né en 1993, vainqueur US Open 2020), Medvedev (né en 1996, vainqueur US Open 2021) voire Zverev (né en 1997, finaliste malheureux en Australie, Roland-Garros, US Open) sont passés à la trappe. Une vraie «génération sacrifiée» maintenant qu’Alcaraz (né en mai 2003) et Sinner (né en août 2001) ont raflé les six tournois du Grand Chelem en jeu depuis janvier 2024.
La roue de la vie avance plutôt qu’elle tourne sur elle-même. Nous venons d’assister à une énième révolution. Plus-que-parfait d’un passé récent en transition vers un futur conditionnel.
Nasolo-Valiavo Andriamihaja