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Derrière l’écran, des vendeurs sur les réseaux sociaux. |
Plus besoin d’étal ou de boutique : à Madagascar, un téléphone suffit pour faire du commerce. Portée par Facebook et TikTok, la vente en ligne devient un véritable gagne-pain pour beaucoup.
Aujourd’hui, ma boutique, c’est mon téléphone. Mon marché, c’est Facebook. » Sarobidy, vendeuse à Antananarivo, incarne cette nouvelle génération de commerçants qui n’ont plus besoin de boutique physique pour vendre. Avec un smartphone et un peu d’intuition, elle fait tourner son affaire en ligne.
À Madagascar, la vente sur Internet s’impose comme une solution accessible, en particulier pour les femmes. Friperies, vaisselle, sacs de luxe, électroniques… tout se vend via Facebook, TikTok ou WhatsApp. Grâce aux directs, les vendeurs présentent leurs produits en temps réel, répondent aux questions, et les clients commandent sans avoir à se déplacer.
« Même sans suivre une page, les produits apparaissent dans le fil d’actualité. On regarde, on aime, on achète », témoigne Sandratra, une cliente. Cette proximité virtuelle remplace peu à peu celle des marchés traditionnels. Le client pose ses questions en direct, voit les articles en vidéo, puis se fait livrer dans la journée.
Et ce modèle séduit. Beaucoup y voient une voie vers l’indépendance. « Pas besoin de diplôme, juste de l’intuition et une bonne organisation », confie Sarobidy.
L’ouverture d’une balle de friperie coûte entre 100 000 et 2 000 000 ariary. C’est un pari, mais parfois très rentable. « C’est comme une boîte surprise. Parfois, c’est le jackpot, parfois non », sourit Mialy, gestionnaire de la page Soa Ra.
Autour de ce nouveau marché, tout un écosystème s’est formé : services de livraison, fournisseurs en gros, groupes de revendeurs. Le bouche-à-oreille virtuel fait le reste. Aujourd’hui, les frais de livraison tournent autour de 3 000 ariary en centre-ville, et jusqu’à 5 000 ariary dans les quartiers périphériques.
Vide juridique
Mais tout n’est pas toujours parfait. Nomena, client régulier, reste prudent : « Parfois, on paie la livraison, mais l’article reçu ne correspond pas vraiment à la vidéo ou aux photos. C’est un peu la loterie. » Des aléas qui ne freinent pas pour autant l’engouement.
Ce commerce numérique devient peu à peu une nouvelle forme de commerce de proximité, à la fois souple, direct et très réactif.
Dans un contexte d’expansion continue, les autorités tentent d’instaurer un cadre réglementaire. Le ministère du Commerce a bien établi une fiche technique il y a cinq ans, mais celle-ci ne couvre toujours pas les transactions effectuées via les réseaux sociaux. Ces plateformes évoluent donc dans une zone grise juridique, sans encadrement légal clair de leurs activités commerciales. La mise à jour de ces dispositifs représente un véritable défi pour les institutions souhaitant intégrer ces nouveaux modes de commerce dans l’économie formelle.
Rivo Rakotondrasanjy, président du Fivmpama, alerte : « Comme partout, certains vendeurs sont en règle, d’autres non. Il faut avoir un NIF, un numéro statistique. Beaucoup utilisent les réseaux comme simple vitrine. Le sujet n’a pas encore été sérieusement traité. »
Irina Tsimijaly