Le monde s’est souvenu hier du 80ᵉ anniversaire de la fermeture du camp de concentration et d’extermination d’Auschwitz-Birkenau par l’Armée rouge soviétique. Un événement marqué par des manifestations et des visites de ces sinistres endroits devenus des musées pour que les nouvelles générations n’oublient pas l’histoire et mesurent la cruauté des Nazis. Plusieurs grands dirigeants du monde ont assisté aux manifestations, mais aucun discours n’a été prononcé. Ironie de l’histoire, aucune autorité russe n’a été invitée, alors que, si l’Armée rouge n’était pas intervenue, le monde n’en serait pas là aujourd’hui.
Plus d’un million d’hommes, d’enfants et de femmes, dont 90% des Juifs, ont péri à Auschwitz, assassinés dans les chambres à gaz, exécutés ou succombant à la faim ou aux maladies. Ils ont été déportés par wagons depuis plusieurs endroits avant d’être exterminés par les Nazis, selon ce qu’ils appelaient « la solution finale ».
Par miracle, quelques hommes, enfants et femmes ont pu échapper à la mort. Ils ont entre 80 et 100 ans, mais ont encore bon pied, bon œil, la mémoire fraîche et l’esprit vif. Ils ont pu faire des témoignages glaçants hier. Ils n’ont oublié aucun détail. Ils ont perdu presque tous leurs proches, mais tous ont fait appel à la tolérance et à la paix. Un vœu déjà démenti par l’actualité, avec ce qui se passe en Ukraine et à Gaza, où la guerre a déjà fait autant de victimes qu’à Auschwitz.
Deux ans après la fermeture d’Auschwitz, « l’insurrection malgache » a éclaté, en particulier à Moramanga. Les militaires français ont durement réprimé la révolte des autochtones attribuée à tort ou à raison au Mouvement Démocratique pour la Rénovation Malgache (MDRM). Une répression sanglante dont le bilan officiel établi par l’autorité coloniale fait état de onze mille morts. Les nationalistes malgaches avancent, quant à eux, plus de cent mille victimes.
Auschwitz et Moramanga ont ceci de commun que les wagons ont joué un rôle crucial dans l’histoire. Les militaires français ont tiré sur trois wagons où étaient entassés des « rebelles ». Le bilan publié mentionne cent soixante-six morts.
Autant le monde se souvient d’Auschwitz-Birkenau comme le plus grand massacre de l’humanité, autant les Malgaches doivent entretenir la mémoire de la répression du 29 mars 1947. Et pas seulement en créant de nouveaux vétérans de plus en plus jeunes à chaque commémoration.
Sylvain Ranjalahy