Le Fitampoha, une des coutumes traditionnelles des Sakalava du Menabe. |
L’historienne Ramisandrazana Rakotoariseheno a mené de nombreuses recherches sur les ancêtres des Malgaches, en particulier les Vazimba. Ainsi, dans la communication qu’elle présente à l’Académie malgache dont elle est membre titulaire, le 22 juillet 2021, elle parle de « Nos ancêtres, les Vazimba ».
D’emblée, elle fait remarquer que « dans le schéma mental des Malgaches, les Vazimba sont l’objet, soit de quolibets, soit de peur irrationnelle, soit de culte ancestral. Or, certaines bribes de l’histoire nous montrent qu’ils sont aussi Malgaches que nous, et qu’ils ont leur propre histoire à l’intérieur de l’histoire dite ‘officielle’, c’est-à-dire la plus répandue, la plus codifiée, et la plus dogmatique».
L’historienne ajoute que les vagues de migrations, à différentes époques, ont des répercussions importantes aussi bien dans la mise en place des groupes que dans leurs relations ultérieures. Cela se traduit dans des systèmes d’incorporations ou de rejets. « L’histoire est alors une arme politique, pour les uns et les autres, de faire valoir et de moyen d’existence.»
Selon Ramisandrazana Rakotoariseheno, les travaux de Jean-Pierre Domenichini et de Bakoly Domenichini-Ramiaramanana, publiés dans le « Journal de La Réunion», le 16 février 2003, démontrent amplement la fonction du mythe et des légendes qui ont servi de dépréciation et de « condamnation à l’oubli » des anciens rois, maîtres du pays. Leur pseudo-nanisme et monstruosité, « image d’Épinal d’une histoire statique, par opposition à une histoire dynamique, celle de la dynastie de Rangita », ne sont que des allégories de réduction politique, estime-t-elle.
Les Vazimba de l’Ouest sont les plus connus dans la littérature ethnographique. Alfred Grandidier a rédigé une petite note sur les Vazimba en disant « qu’ils étaient peut-être les Ontaysatroha de Flacourt, disparus fort longtemps, mais aussi les Behaisotra en pays Bara. Il en a vu beaucoup d’entre eux sur les bords de la rivière Manambolo, en 1869. D’après lui, les Vazimba croient que ceux qui s’allieraient aux familles d’origine étrangère perdraient l’esprit et la mémoire. Tressant leurs cheveux soit en petites nattes comme dans l’intérieur de l’ile, soit en boule comme chez les Sakalava, ils sont habiles à la poterie et à la pêche en utilisant des pirogues étroites appelées « molanga ». Ils cultivent du manioc et des bananes, mais peu de riz. Ils croient en un Dieu unique, mais ils adressaient surtout leurs prières aux mânes de leurs ancêtres ‘lolo’. Ils avaient beaucoup de fady et leurs enfants nés un dimanche sont abandonnés. »
Toujours selon Grandidier, ils ont l’habitude de faire des « sorona » (sacrifices) accompagnés d’encens (emboka). Ils emploient, dans les cérémonies funéraires, le grand tambour « hazolahy », mais par la suite, cela leur est interdit par le dernier roi du Menabe, Tovonkery. C’est le roi sakalava Andrinihahianina qui leur aurait emprunté cette coutume. Les ossements des morts sont placés sous abri pour sécher.
« Jadis, les Vazimba les veillaient pendant plusieurs semaines et recueillaient dans des calebasses les matières liquides provenant de la décomposition de chairs qu’ils mettent dans des ‘antara’. Lorsqu’ils possédèrent des bœufs, ils prirent l’habitude d’en immoler à la mémoire des morts, ils versèrent le sang dans le trou dans la pensée de donner une nourriture agréable au serpent, comme chez les Antanandro des Betsileo. »
Le même auteur rappelle l’aventure de Drury en pays sakalava. Gravement atteint d’une maladie vénérienne, il demande l’aide du souverain sakalava qui lui dit d’aller voir les Vazimba qui connaissent les remèdes les plus adéquats pour sa maladie. Par la suite, Drury décrit les Vazimba comme étant de souche indonésienne et parlant la langue malgache. « Ce qui est encore confirmée par Grandidier. »
Ce dernier précise que les Vazimba du Menabe, d’après leurs traditions, sont originaires de la côte Ouest d’où ils gagnent le massif central. Leur premier roi est Ralefotokana auquel succède Rafoza, dont la réputation se conserve à travers les âges. À l’époque où Grandidier visite la région, ils ne sont pas les seuls habitants de l’Ouest, car il y a les Vezo, les Mikehana, les Sandagoatsy (qui seraient de vrais Vazimba) qui tous sont tompontany, maîtres du sol, c’est-à-dire aborigènes de même race. Plus tard, ils se confondent avec leurs conquérants sakalava. Enfin, les Vazimba n’ont pas eu d’esclaves, n’ont pas pratiqué la circoncision, et la succession au niveau de leurs rois, n’est pas directe mais collatérale.
Pela Ravalitera